La claque des trois têtes à claques

 |  par Patrick JEAN-PIERRE

Depuis des années ces trois-là occupent nos écrans et nos radios, les pages de nos journaux et les murs de nos réseaux sociaux, comme trois larrons en foire, satisfaits d'eux-mêmes, se rengorgeant à tout bout de champ, la répartie méprisante à portée de lèvres, l'arrogance hautement affichée. Ils se sont crus éternels. Du moins sur la scène politique. Tels des acteurs ou des chanteurs qui ne comptent absolument pas quitter la scène tant que leur cœur battra.

LUREL, TAUBIRA, LETCHIMY.

Trois "Ultramarins", comme ils se définissent eux-mêmes, indifférents à la sottise de cette appellation ou à tout le moins inconscients du ridicule dont elle est porteuse. Nationalistes en bouche dans leur terroir, assimilationnistes forcenés une fois que leur avion s'est posé sur le tarmac d'Orly et qu'ils ont gagné l'Assemblée nationale française ou les ors de quelque ministère ou secrétariat d'Etat. Habiles joueurs sur les deux tableaux. Toujours assis entre deux chaises quand ce n'est pas trois. Donneurs de leçons impénitents.

TAUBIRA, LETCHILY, LUREL.

La première à prendre sa claque fut Christiane TAUBIRA dont le parti qu'elle a créé, "Walwari", a subi une cuisante déroute lors du premier tour des élections pour la Collectivité de Guyane le 6 décembre dernier : 7% des voix. La ministre de la Justice n'était certes pas en position éligible (11è), mais la tête de liste du parti, Line Liétard, comptait sur l'aura de TAUBIRA pour engranger des voix. Laquelle TAUBIRA s'était fendu d'un message vidéo à l'adresse des électeurs guyanais. Lesquels ne l'ont pas du tout écoutée, ne la remerciant même pas pour avoir cassé l'Université des Antilles et de la Guyane. Ni non plus pour sa loi sur le mariage pour tous apparemment. Renvoyée dans les choux, TAUBIRA est sur un siège éjectable, murmure-t-on, dans le sérail politique parisien car François HOLLANDE est obligé de procéder à un remaniement ministériel au lendemain du résultat en demi-teinte du PS aux élections régionales et ce malgré la déroute du Front National. Mais la mère TAUBIRA a de l'entregent ! Elle ne sera pas virée pour autant. Simplement elle prendra un ministère moins prestigieux, assurent les bruits de couloir, celui de la culture actuellement occupé par Flore PELLERIN. Sans doute en profitera-t-elle pour faire classer au patrimoine mondial de l'UNESCO les deux autres universités de Guyane, "Kay Nana" et "Kay Polina". 

LETCHIMY, LUREL, TAUBIRA.

Le second a en avoir pris plein la figure a été Victorin LUREL, l'Imperator de l'île-papillon, le grandiose et grandiloquent Maître de la Guadeloupe, de ses dépendances (et, croyait-il, de sa dépendance de l'extrême-sud, la Martinique). Lui aussi, dès le premier tour a subi un volée de bois vert puisque son adversaire Ary CHALUS l'a devancé de plusieurs milliers voix alors que Lurel disposait du soutien d'Eric JALTON et de la commune des Abymes, la plus peuplée de l'archipel. Toto n'a rien compris à ce qui lui arrivait en dépit de sa déroute marigalantaise et s'est mis à s'agiter comme un beau diable, à éructer, à promettre, à menacer, à flatter, à caresser dans le sens du poil tout ce que la Guadeloupe compte comme électeur potentiel. Cela en était pathétique ! Voir un Imperator s'écrouler ainsi de son piédestal est un spectacle à la fois fascinant et pitoyable. Au deuxième tour, LUREL a été renvoyé sèchement dans ses foyer par un score sans appel. Une véritable Bérézina ! Reste à espérer que par charité chrétienne, on lui offre, en remerciement pour ses bons et loyaux services, la direction du Mémorial Act, lieu idéal pour méditer sur les dégâts collatéraux de la servilité et le larbinisme.

LUREL, LETCHIMY, TAUBIRA.

Le troisième et dernier à s'effondrer a n'est autre que Serge LETCHIMY, héritier auto-proclamé d'Aimé CESAIRE lequel déclarait urbi et orbi qu'il n'était pas un roi et n'avait pas à désigner de dauphin. Au 1er Tour des élections pour la Collectivité Territoriale de Martinique, il a pu croire un instant (une semaine en fait), sa liste étant sortie en tête, qu'il l'emporterait au second tour. 38% pour sa liste EPMN contre 30% pour la liste "GRAN SANBLE" conduite par Alfred MARIE-JEANNE. Les choses semblaient pliées, l'affaire dans le sac, sauf que LETCHIMY a reçu un "kwoch-pat" dont il se souviendra pour le restant de sa vie : l'alliance imprévue et imprévisible de la liste "GRAN SANBLE" avec celle du candidat de Droite, Yan MONPLAISIR, "BA PEYI-A AN CHANS" laquelle avait fait 14% au premier tour. Deuxième "kwoch-pat" tout aussi imprévisible : la fusillade dans une boite de nuit, "LE PAPARAZZI", qui a fait 3 morts. On y apprend, par la bouche du Procureur de la République que deux des principaux protagonistes, voyous multirécidivistes portant des bracelets électroniques, ont été embauchés l'un par la Région, l'autre par la mairie PPM de Basse-Pointe. Dès lors, pris de panique, le Pharaon auto-proclamé de Plateau-Roy met la machine PPM en branle, celle qui depuis près de quarante ans contrôle et quadrille les quartiers populaires de Fort-de-France. Celle qui longtemps a interdit par la force aux candidats adverses de s'exprimer (cf. affaire Jalta) avec une milice composée de "dogs" et qui n'a toujours pas perdu ses vieilles habitudes si l'on en juge par les incidents qui se sont produits à Voie de Ville lors du 1er tour où on a voulu empêcher le "GRAN SANBLE" de s'exprimer. Celle qui fait pression sur les trois mille employés municipaux de la capitale pour qu'ils fassent voter leurs parents dans le bons sens et ramènent le maximum de procurations, y compris de gens vivant en "métropole". Et le samedi précédant le vote, une véritable armada de voitures-sono très bruyantes a sillonné tous les coins et recoins de la ville, enjoignant la population à voter pour LETCHIMY. Tout ce bataclan n'a pas suffi ! La liste AMJ/MONPLAISIR a coiffé sur le poteau celle du Pharaon grâce à une intense mobilisation dans le Sud de la Martinique et dans le centre (dont AMJ est le député). Reste, là encore, à espérer qu'un "zo" sera offert au Pharaon déchu. Pourquoi pas la présidence de l'Agence Anti-Corruption que devra forcément créer la nouvelle majorité afin de nettoyer les écuries d'Augias, celle de l'Agence des 50 pas géométriques étant déjà prise.



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