Vingt-cinq ans de négociations, des sommets interminables, des promesses de "relance stratégique" face à Trump et à la Chine... et voilà qu'en décembre 2025, l'accord UE-Mercosur est une fois de plus reporté à janvier 2026.
Ursula von der Leyen, qui avait ses valises prêtes pour signer au Brésil ce 20 décembre, rentre bredouille. Emmanuel Macron jubile d'un "report historique", les agriculteurs français et italiens exultent après avoir envahi Bruxelles avec leurs tracteurs.
Cet accord, censé créer la plus grande zone de libre-échange du monde (720 millions d'habitants), prévoit d'ouvrir grand les portes : suppression de 91-92 % des droits de douane, quotas accrus pour la viande bovine (99 000 tonnes supplémentaires), le poulet, le sucre et l'éthanol sud-américains.
En échange ? Accès facilité pour nos voitures, vins et machines en Amérique latine. Sur le papier, un "gagnant-gagnant" géopolitique. En réalité, une menace existentielle pour l'agriculture européenne, soumise à des normes environnementales, sanitaires et sociales draconiennes que les producteurs du Mercosur (Brésil en tête) ignorent allègrement.
Les agriculteurs ne s'y trompent pas : ils dénoncent une concurrence déloyale, avec des produits importés à bas coût, souvent issus de déforestation amazonienne massive, dopés aux hormones interdites en Europe ou arrosés de pesticides bannis chez nous. Et malgré les "clauses de sauvegarde" votées in extremis le 17 décembre, malgré les promesses de "réciprocité", le compte n'y est toujours pas. Macron l'a répété : "Cet accord ne peut pas être signé en l'état." Giorgia Meloni, alliée inattendue, a bloqué le processus pour protéger ses paysans italiens.
Résultat : report à janvier, sous pression des manifestations monstres à Bruxelles (milliers de tracteurs, feux de pneus, heurts avec la police). Mais qui croit sérieusement que janvier changera quoi que ce soit ?
La Commission pousse en force depuis septembre 2025, l'Allemagne et l'Espagne salivent sur les exportations industrielles, le Brésil de Lula menace d'un ultimatum. Ce report n'est qu'un sursis, un cache-misère pour éviter l'explosion sociale avant Noël. On nous vend un accord "moderne" avec des engagements climatiques... qui ne sont pas contraignants. On parle de "protection" des agriculteurs européens, mais sans mécanismes réels pour bloquer les importations non conformes.
Au final, on se moque des agriculteurs, sacrifiés sur l'autel du libre-échange dogmatique. On se moque des citoyens européens, qui paieront le prix d'une agriculture affaiblie et d'une dépendance accrue aux importations polluantes. On se moque de l'Europe, qui prône la transition écologique tout en encourageant la déforestation outre-Atlantique. Et on se moque des Sud-Américains, promis à un rôle de fournisseurs de matières premières bon marché.
Les tracteurs ont parlé