La peur se distille et s'installe chez les salariés en Guadeloupe
Dans la hotte du père noël de la Sem, les pressions sur des salariés se multiplient, à l'approche des élections syndicales et des municipales de 2026.
En cette fin d’année 2025, il n’a échappé à personne que la situation économique et sociale en France traverse une période particulièrement tendue. Dans un contexte de croissance molle, de désindustrialisation accélérée et de contraintes budgétaires, les salariés font face à une multiplication des difficultés professionnelles. Attaques sur les conditions de travail, harcèlement moral, convocations répétées et menaces de licenciement : ces phénomènes, loin d’être isolés, touchent de plus en plus de travailleurs, exacerbant un sentiment d’insécurité généralisé.
Lors du conseil territorial de Saint-Martin le 30 novembre 2025, un rapport annuel a révélé une dégradation significative de la situation financière de la SEMSAMAR.
Difficultés financières, 9,5 millions de déficit en 2023, 13 millions en 2024. Et un climat au sein de l'entreprise jugé insupportable par beaucoup de salariés.
Selon certains témoignages, le harcèlement moral reste une réalité quotidienne pour de nombreux salariés. Hors micro, ils déclarent avoir été victime de harcèlement moral, caractérisé par des agissements répétés dégradant leurs conditions de travail, portant atteinte à leur dignité ou à leur santé.
En 2025, malgré un renforcement du cadre juridique (présomption de harcèlement en cas d’indices concordants, protection renforcée des victimes, obligations accrues pour les entreprises de plus de 50 salariés), les signalements restent élevés. La santé mentale au travail a même été déclarée "grande cause nationale" pour 2025, témoignant de l’ampleur des risques psychosociaux. Management toxique, pressions excessives et isolement : ces pratiques, souvent liées à des objectifs de productivité irréalistes, servent parfois de prélude à des procédures disciplinaires ou de licenciement. |
Dans ce climat, les convocations à des entretiens préalables à sanctions disciplinaires ou licenciement se multiplient. Elles sont perçues par beaucoup comme des moyens de pression pour pousser les salariés à la démission ou accepter des conditions dégradées. Les réformes successives du droit du travail, perçues comme facilitant les ruptures de contrat, ont contribué à ce sentiment : "Il n’a jamais été aussi facile de licencier", alerte la CGT.
Les salariés, épuisés par ces attaques répétées, voient leur santé mentale et physique se dégrader : arrêts maladie en hausse en cette fin d'année 2025, burn-out, perte de confiance. Avec des effets domino sur les familles.
A la Semsamar en Guadeloupe, tandis que certains dirigeants jouissent tranquillement des fêtes de fin d'année, de l'autre côté de l'échiquier, c'est tristesse et affliction.
Le site officiel de la SEMSAMAR met en avant des recrutements et un plan de développement positif, sans évoquer de restructuration négative
Plus de cinq salariés se sont vus ainsi remettre des lettres de convocation à un entretien préalable à des sanctons disciplinaires pouvant aller jusqu'au licenciement.
Certains font l'objet de mise à pied après avoir fait l'objet d'enquêtes à charge sur leur traitement de dossiers et sur leur comportement professionnel , jugé là aussi comme " inadéquat ".
D'autres salariés tentent de résister. Ainsi, toujours selon nos informations, une autre collaboratrice de la Sem aurait introduit un recours devant les Prud'hommes en 2025 .
Par ailleurs, la rédaction a appris que des courriers ont été envoyés en plus hauts lieux : au Ministère du Travail et des Solidarités (Jean-Pierre Farandou), au Ministère des Outre-mer (Naïma Moutchou), ainsi qu'au Premier Ministre.
Sébastien Lecornu a été ministre des Outre-mer de juillet 2020 à mai 2022, sous la présidence d'Emmanuel Macron. À ce titre, il a géré des dossiers ultramarins généraux (reconstruction post-cyclones, développement économique, etc.)
Il est aux manettes d'un ministère des Outre-mer, dans la lignée des critiques du chef de l'État contre la Semsamar.
Pour rappel lors de sa visite à Saint-Martin en septembre 2018 (un an après l'ouragan Irma). Macron a dénoncé des retards dans la reconstruction des logements sociaux, des loyers élevés et des pratiques passées irrégulières, menaçant de procédures pour "marchands de sommeil".
On connaît la suite. Affaires judiciaires impliquant d'anciens dirigeants (comme Marie-Paule Bélénus-Romana et Jean-Paul Fischer) pour favoritisme, abus de biens sociaux et détournements, avec des mises en examen et condamnations en 2024-2025.
Le service RH de la SEMSAMAR met à exécution toutes directives, les syndicats sont timorés, l'inspection du travail (DIECCTE pour les Outre-mer) sollicitée semble minimiser la situation. Pourtant le Code du travail applicable protège contre les abus et offre des recours en cas de harcèlement ou de licenciement irrégulier.
Les médias locaux (France Antilles Guadeloupe, RCI, Guadeloupe La 1ère) et nationaux se concentrent principalement sur les affaires judiciaires héritées (condamnations en 2024-2025 d’anciens dirigeants pour abus de biens sociaux et favoritisme), et plus récemment sur des aspects positifs comme l’obtention d’un label anticorruption (ISO 37001) en novembre 2025.
Divisé, le personnel peine à se mobiliser et réagir.
Récemment l'UGTG a adressé "une mise en garde formelle" à la Présidente (Véronique Roul) de l'ARMOS - regroupant la quasi-totalité de l'offre locative sociale via ses cinq sociétés adhérentes, dont la Semsamar - "concernant tous ces actes de harcèlement moral et d'entrave syndicale au sein de la SEMSAMAR ".
Et de poursuivre "Si de tels agissements persistent au sein de la SEMSAMAR sans réaction de votre part, les conséquences dépasseront très largement le seul périmètre de cet organisme et affecteront l'ensemble des SEM membres de l'ARMOS"