Cameroun : Paul Biya veut faire fusiller ses opposants.

 |  par Patrick JEAN-PIERRE
C'est la première réaction d'hostilité au discours prononcé à Dakar par François Hollande, contre la tendance à s'éterniser au pouvoir de certains dirigeants africains.
Le pouvoir camerounais envisage d'interdire toute manifestation publique, sous peine de mort. Un projet de loi allant dans ce sens a été déposé à l'Assemblée nationale camerounaise. Ce texte sur lequel les députés sont invités à débattre dès vendredi punit de la peine capitale toute manifestation de nature à gêner le fonctionnement normal des institutions. Sous couvert de la lutte contre le terrorisme. L'opposition et la société civile exigent son retrait, jugeant qu'il brime les droits politiques au moment où des voix s'élèvent de toutes parts pour réclamer le départ de Paul Biya, 81 ans, au pouvoir depuis 32 ans.
"Quand on fait voter des peuples pour des Constitutions à travers des référendums, on ne peut pas les modifier impunément. Quand un chef d'Etat reste plusieurs mandats de suite, et qu'à un moment il est fixé une limite d'âge ou il est fixé un nombre de mandats qui ne peut pas être dépassé, il ne peut pas en être décidé autrement", avait déclaré François Hollande dans un discours prononcé à Dakar, la capitale sénégalaise, lors du 15e sommet de la Francophonie qui s'est terminé dimanche. Un sermon inédit, assené sans langue de bois diplomatique, qui visait particulièrement quelques dirigeants africains, présents, eux aussi à ce sommet.
Interrogé peu après par TV5 et France 24 sur la situation de la République démocratique du Congo (RDC), du Congo (Brazzaville) ou du Rwanda, le président de la République enfonce le clou. Il laisse entendre que l'expérience burkinabè, où Blaise Compaoré a été forcé par la rue à quitter le pouvoir « peut servir de leçon à beaucoup de chefs d'Etat, pas seulement en Afrique (...) On ne change pas l'ordre constitutionnel par intérêt personnel.»
Sur France 24, seule la ministre rwandaise des Affaires étrangères, Louise Mushikiwabo, dont le pays est en froid avec la France au sujet du génocide de 1990, critique M. Hollande. Elle juge son attitude « très inélégante ».
«Je trouve ça gênant qu'un président qui est avec ses pairs, ici, au sommet de la Francophonie ne vienne pas discuter avec eux, mais dicter ce qui devrait se passer dans leur pays.»
« Ce n'est pas Paris qui décide » de l'avenir politique des Africains, tranche-t-elle.
Les dirigeants africains, eux, ont acquiescé en silence. Parmi eux, Paul Biya. Frappé par la limitation des mandats, il avait réussi à modifier la loi fondamentale camerounaise il y a quatre ans pour se représenter, en 2011. Au prix d'une répression féroce des manifestations qui avait fait une centaine de tués. Elu pour sept ans lors d'un scrutin entaché d'irrégularités selon les organisations internationales, son mandat actuel court jusqu'en 2018. Cependant, il craint la contagion de l'expérience burkinabè, où soumis à la pression de la rue, Blaise Compaoré a dû abandonner un mandat en cours.
A Yaoundé en effet, des voix s'élèvent de plus en plus pour réclamer son départ. Et la nervosité du pouvoir ne cesse de s'accroitre. Un débat consacré à la gouvernance et la démocratie a été interdit. L'élection du nouveau président de la Fédération camerounaise de football (Fecafoot), verrouillée d'avance par le pouvoir qui a éliminé tous les candidats sauf celui qu'il soutenait a été reportée en 2015. Par crainte des manifestations de rue.
« Après le départ de Blaise Compaoré au Burkina Faso, Paris s'inquiète des risques d'éventuelles pressions de la rue pour obtenir [le départ des] dirigeants au Cameroun et au Tchad », lit-on cette semaine dans le JDD, qui cite une source diplomatique.
Mardi, le gouvernement camerounais dépose à l'Assemblée nationale un projet de loi portant répression des actes terroristes. Le prétexte ? La lutte contre les islamistes de Boko Haram venus du Nigéria voisin. Depuis plusieurs mois, ceux-ci font des incursions dans le nord du Cameroun, soumettant les populations et l'armée à rude épreuve. Cependant, à la lecture projet de loi, les opposants et les spécialistes du droit pénal découvrent, horrifiés, qu'il vise en réalité à criminaliser toute manifestation contre le régime.
Le texte amalgame en effet acte de terrorisme et manifestation de protestation citoyenne. Il interdit tout acte qui se traduirait par « la perturbation du fonctionnement normal des services publics, la prestation des services essentiels aux populations », ou qui créerait « une situation de crise au sein des populations ». Sanction : la peine capitale, toujours en vigueur dans le pays.
« N'importe quelle manifestation d'une quelconque opposition à une entité publique ou privée est assimilable à du terrorisme et dès lors, l'auteur est susceptible d'être condamné à mort. A titre d'exemple, la grève de la faim des employés de la CNPS [Caisse nationale de prévoyance sociale] ou la manifestation des étudiants sur la voie publique peuvent désormais entrer dans la même catégorie que le dépôt de bombes des activistes de Boko Haram », a réagi Edith Kah Walla, présidente du Nationale Cameroon People's Party, un des partis d'opposition les plus actifs.
Juriste mondialement connu et ancien ministre délégué à Justice, Maurice Kamto, par ailleurs président du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC), un parti d'opposition, ne dit pas autre chose. « Le projet de loi créé manifestement une infraction politique puisqu'il interdit de la sorte l'expression collective, même pacifique d'un désaccord politique. Il assimile en définitive les populations camerounaises qui manifesteraient leur mécontentement à des terroristes", écrit-il dans un communiqué de presse publié mardi.
M. Kamto ajoute que le texte, viole plusieurs dispositions du droit international, notamment la Résolution 2178 du Conseil de sécurité relative à la lutte contre le terrorisme. Laquelle enjoint les Etats confrontés au terrorisme, à agir de manière à préserver les droits et libertés individuels.
« Au nom de la liberté et de démocratie chèrement acquises dans notre pays, de la paix si chère à notre peuple, barrons la voie à ce projet de loi inique! Personne ne devra dire demain qu'il ne savait pas », tranche Maurice Kamto.
A sa suite, des citoyens camerounais vivants au pays ou à l'étranger ont initié une pétition, demandant le retrait pur et simple du projet de loi. Il est disponible à l'adresse suivante :
https://www.change.org/p/gouvernement-et-parlement-de-la-republique-du-cameroun-retrait-du-projet-de-loi-anti-terroriste-a-l-assembl%C3%A9e-nationale-du-cameroun?just_created=true
 


Partager cet article

Lampedusa : La fermeté de Darmanin face aux migrants
Politique

Lampedusa : La fermeté de Darmanin face aux migrants

«La France n'accueillera pas de migrants qui viennent de Lampedusa». Au lendemain de son entretien à Rome avec son homologue italien concernant l'afflux de ...
Le RSA en sursis ?
Économie

Le RSA en sursis ?

Le gouvernement compte faire des économies en réformant le revenu de solidarité active (RSA). Une refonte qu'il compte faire voter prochainement. La Fondati...
De Washington à Alger, solidarité avec le Maroc après le séisme
Société

De Washington à Alger, solidarité avec le Maroc après le séisme

Le séisme, qui a fait plusieurs milliers de morts au Maroc dans la nuit de vendredi à samedi, a suscité un élan de solidarité dans le monde, plusieurs pays e...
Président Michel : "nous travaillons dur pour que l'Ukraine ait ce dont elle a besoin : plus d'armes, plus de munitions, et plus vite"
Europe

Président Michel : "nous travaillons dur pour que l'Ukraine ait ce dont elle a besoin : plus d'armes, plus de munitions, et plus vite"

Remarques liminaires de Charles MICHEL, président du Conseil européen, lors de la conférence de presse précédant le sommet du G7 le 19 mai 2023 à Hiroshima.
Le monde se réunit à l’ONU pour prendre le pouls de la planète
Monde

Le monde se réunit à l’ONU pour prendre le pouls de la planète

Le moment est à nouveau venu ! Comme chaque année, les projecteurs du monde entier se braqueront sur le Siège de l'ONU à New York à la fin du mois, lorsque l...
Les volcans du nord de la Martinique rejoignent le patrimoine mondial de l’Unesco
Santé-Environnement

Les volcans du nord de la Martinique rejoignent le patrimoine mondial de l’Unesco

Les volcans et forêts de la Montagne Pelée et des pitons du nord de la Martinique ont été inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco, a annoncé ...
Jacob Desvarieux : l'offrande de quelques souvenirs incandescents par Patrick Chesneau (Hommage)
Culture

Jacob Desvarieux : l'offrande de quelques souvenirs incandescents par Patrick Chesneau (Hommage)

C'était il y a deux ans. C'était hier et déjà une éternité. En ce 30 juillet 2021, sa courte barbe poivre et sel et ses yeux rieurs se sont retranchés de no...
US OPEN 2023 : Coco Gauff digne héritière de Serena Williams
Sports

US OPEN 2023 : Coco Gauff digne héritière de Serena Williams

L’Américaine Coco Gauff remporte à 19 ans son premier Grand Chelem en battant Aryna Sabalenka. Incredible ! La jeune Floridienne a battu en finale la Biélor...
GÉRARD LECLERC : le journaliste a trouvé la mort dans un accident d'avion
People

GÉRARD LECLERC : le journaliste a trouvé la mort dans un accident d'avion

Le journaliste de CNEWS Gérard Leclerc a disparu ce mardi 15 août dans le crash d’un petit avion de tourisme qu’il pilotait à Lavau-sur-Loire (Loire-Atlantiq...

Veuillez activer le javascript sur cette page pour pouvoir valider le formulaire



©2021 Patmédias, tous droits réservés - Réalisation agence web corse

Haut de page
  • E.MACRON / MIGRANTS : "On a un système généreux. On ne peut pas accueillir toute la misère du monde". "C'est une question où l'Europe doit jouer groupée et avec les pays d'origine".

  • E.MACRON / LOI SUR L'IMMIGRATION : «Il faut faire une loi pour se mettre au diapason de l’Europe. Le cœur de ce texte est d’accélérer nos procédures et d’avoir une politique efficace (...) pour renvoyer plus efficacement les personnes qui n’ont pas à être dans le pays. On doit aller beaucoup plus vite». Et d’ajouter : «Mais il ne faut pas être hypocrite, il y a beaucoup de métiers en tension qui embauchent des personnes en situation d’immigration». Sur ce point, «on doit trouver du bon sens», a-t-il dit.

  • E.MACRON / POUVOIR D'ACHAT : "On va travailler avec toutes les branches où le salaire minimum est en dessous du SMIC légal. Je ne suis pas pour qu'on indexe tous les salaires sur les prix sinon on tombe dans une spirale inflationniste". "On va mettre en place un accord sur la modération des marges dans l'agroalimentaire".

  • E.MACRON / ESSENCE : Le président a évoqué la mise en place d’un mécanisme qui va concerner les travailleurs modestes, « cent euros par voiture et par an ». « C’est limité mais c’est pertinent, on va aider ceux qui en ont besoin pour travailler. On ne peut pas laisser certains compatriotes qui ont besoin de rouler pour travailler face à des prix élevés. » "La ministre va réunir les distributeurs. On va demander de faire un prix coûtant".

  • E.MACRON / NIGER : Emmanuel Macron annonce le retrait des troupes françaises et le retour de son ambassadeur.

  • E.MACRON / KARABACH : Le chef de l'Etat français a apporté ce soir son soutien «inconditionnel» aux Arméniens. «Nous continuerons à soutenir sur le plan humanitaire et politique», a dit le chef de l’État ce dimanche soir. «La France est aujourd’hui très vigilante à l’intégrité territoriale de l’Arménie. La Russie est complice de l’Azerbaïdjan. La France se tiendra aux côtés du peuple arménien.»

  • E.MACRON / TRANSITION ECOLOGIQUE : «La France sera parmi les premiers d'Europe à sortir du charbon. Emmanuel Macron plaide aussi pour l’électrification. «On doit le faire en étant intelligent, en produisant chez nous les véhicules et les batteries. On est attachés à la bagnole, et moi je l’adore. Aujourd’hui, on produit entre 1 et 1,5 million de véhicules sur notre sol. Ces dernières années, on a relocalisé grâce à l’écologie.», clame Macron.

  • SÉNATORIALES : Les premiers résultats des élections sénatoriales ont confirmé dimanche une tendance à la stabilité de la Chambre haute, dominée par la droite, et les difficultés du camp présidentiel, qui a essuyé un premier revers en Nouvelle-Calédonie.

  • OPPOSANT DÉLOGÉ : Un opposant au projet d'autoroute Toulouse-Castres installé depuis 10 jours dans un arbre face au ministère de la Transition écologique, à Paris, en a été délogé dimanche matin par les autorités, a-t-on appris au ministère des Transports, qui invoque la nécessité d'"assurer sa prise en charge médicale".

  • RECTORAT DE VERSAILLES : L'ex-rectrice de Versailles, Charline Avenel, n'avait "pas eu connaissance" du courrier polémique envoyé par le rectorat aux parents de Nicolas, 15 ans qui s'est suicidé à la rentrée après avoir subi un harcèlement, a-t-elle déclaré dans un entretien publié samedi soir par Le Parisien.

  • RAPPEUR MHD : D'étoile montante de l'"afro-trap" à la case prison: le rappeur MHD a été condamné samedi à 12 ans de prison aux assises de Paris, où il comparaissait avec huit coaccusés pour le meurtre d'un jeune homme en 2018, dans le cadre d'un règlement de comptes entre bandes rivales.

  • XAVIER NIEL : Le milliardaire Xavier Niel renforce sa position au capital du groupe Le Monde en rachetant, avec l'assentiment des salariés, la part détenue par l'homme d'affaires tchèque Daniel Kretinsky, qui va se concentrer sur d'autres médias.

  • ARMÉNIE : Un premier groupe de réfugiés fuyant le Nagorny Karabakh est entré dimanche en Arménie qui a de son côté implicitement reproché à la Russie son manque de soutien dans la foulée de la victoire de l'armée azerbaïdjanaise contre les séparatistes de ce territoire en majorité peuplé d'Arméniens.

  • ONU : Les Occidentaux "combattent directement" la Russie en Ukraine, a accusé samedi à l'ONU le ministre russe des Affaires étrangères au moment où Kiev affirme avoir tué des chefs militaires russes dans la péninsule stratégique de Crimée.

  • HAITI : Après des mois de tractations, les contours d'une force internationale de police pour aider Haïti, en proie à la violence des gangs, commencent à se dessiner, mais pas assez vite pour le Premier ministre qui a appelé à nouveau l'ONU à "agir", de façon urgente.

  • AZERBAIDJAN : Plusieurs centaines de réfugiés fuyant le Nagorny Karabakh sont entrés dimanche en Arménie, qui a implicitement reproché à la Russie son manque de soutien après la victoire de l'armée azerbaïdjanaise contre les séparatistes de ce territoire en majorité peuplé d'Arméniens.

  • KOSOVO : Des hommes armés retranchés dans un monastère, un policier mort, trois assaillants tués: la situation reste très tendue au Kosovo dimanche, où les autorités fustigent le "crime organisé soutenu par des responsables à Belgrade", et la Serbie les "mensonges" de Pristina.

  • ASTÉROIDE : Sept ans après son décollage, la sonde Osiris-Rex a accompli sa mission, livrer à l'humanité le plus gros échantillon d'astéroïde jamais collecté dans l'espace, et le premier par la Nasa.

  • MER ROUGE : Des scientifiques s'inquiètent pour les célèbres récifs coralliens de la mer Rouge après avoir découvert qu'un mal mystérieux décimait une population d'oursins indispensable à leur survie.

  • MARATHON : L'Éthiopienne Tigst Assefa a pulvérisé le record du monde féminin du marathon dimanche en fin de matinée à Berlin, en 2h11:53, abaissant la précédente meilleure marque de la Kényane Brigid Kosgei de plus de deux minutes (2h14:04).