Pourquoi recruter à l'étranger quand les Outre-mer saignent d'un chômage endémique ? France Travail dans le collimateur des syndicats ultramarins... et le silence radio de Paris

 |  par Rédaction Patmedias
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Dans les Antilles, en Guyane ou à La Réunion, le chômage n'est pas une statistique : c'est une plaie ouverte. Plus de 20 % en Guadeloupe, 37 % à La Réunion – un record absolu en France –, et des jeunes qui errent sans horizon.

Pourtant, France Travail, l'ex-Pôle Emploi rénové, facilite l'importation de main-d'œuvre étrangère pour l'agriculture, la construction ou les soins. Des syndicats comme la CGTM ou l'UGTG hurlent au scandale : néocolonialisme économique, sous-enchère salariale, formation boudée des locaux.

Mais qui en parle ? Pas les médias locaux, hexagonaux, pas Matignon.

À l'approche des municipales 2026, ce tabou ultramarin révèle une République à deux vitesses : on exporte les chômeurs d'Outre-mer vers le continent, tout en important des travailleurs low-cost sur place.

Que dire d'une aberration qui pue l'hypocrisie.

Un chômage "zénithal" ignoré : les chiffres qui accablent

Agriculteurs réunionnais : "On cherche désespérément de la main-d'œuvre", titre La 1ère en juin 2025, oubliant les milliers de chômeurs locaux formés... mais pas embauchés.

France Travail, complice d'une sous-enchère importée ?

Les syndicats ultramarins ne mâchent pas leurs mots. L'Union générale des travailleurs de Guadeloupe (UGTG) et la Confédération générale du travail de Martinique (CGTM) dénoncent une "fabrique à précarité" orchestrée par France Travail. "Pourquoi aller recruter à l'étranger alors que les Outre-mer souffrent d'un chômage important ?", s'interroge un communiqué conjoint en octobre 2025, relayé par des collectifs comme le GISTI.

Leur grief ? L'agence valide des autorisations de travail pour des gens de l'Hexagone, des saisonniers haïtiens en bananeraies guadeloupéennes ou des ouvriers bangladais sur les chantiers guyanais, sans exiger de priorité aux résidents.

Résultat : salaires tirés vers le bas (SMIC horaire vs. primes locales), conditions précaires (logements insalubres, heures sup' impayées), et une concurrence déloyale qui décourage les formations. Ceux venus de l'Hexagone ont un meilleur traitement.

À La Réunion, la CFDT locale tape du poing : "On cloisonne le droit au travail par territoire, forçant les étrangers à rester sur place sans mobilité, pendant que les employeurs pleurnichent sur la pénurie."

Amnesty International, dans son rapport d'octobre 2025, corrobore : "À la merci d'un papier", les travailleurs étrangers – souvent non-européens – subissent des titres de séjour trop courts, des renouvellements kafkaïens, et une précarité "systémique" qui profite aux patrons.

Les syndicats y voient un néocolonialisme soft : importer de la "main-d'œuvre bon marché" pour des métiers "en tension" (agriculture salariée, BTP, aide-soignante), listés dans l'arrêté du 21 mai 2025, sans investir dans l'insertion des ultramarins.

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  UGTG FT

Le grand silence : un tabou politique et médiatique

Pourquoi personne n'en parle ? Parce que ça dérange. À Paris, Sébastien Lecornu, Premier ministre aux accents ultramarins, vante la "préférence nationale" dans son plan anti-corruption du 14 novembre, mais oublie les DOM dans les 36 mesures.

La LODEOM (Loi sur l'orientation du développement économique outre-mer), réformée en 2025, est accusée de "coup terrible à l'emploi local" par les oppositions à l'Assemblée.

Résultat : des job fairs comme "Paris pour l'emploi des Outre-mer" (8e édition en 2025) exportent les talents ultramarins vers l'Hexagone – Le Creusot séduit les Martiniquais pour ses usines –, pendant que les jobs sur place filent aux étrangers.

Médias ? La 1ère et Outremers360 touchent du bout des doigts le sujet, mais les radios et télévisions du service dit "Public"? Silence.
Les grèves du chômage d'octobre 2025, mobilisant 45 territoires dont les DOM, n'ont pas fait la une.
Pourquoi ? Parce que dénoncer France Travail, c'est pointer l'État : l'agence, sous tutelle du ministère du Travail, applique des quotas migratoires qui masquent l'échec de l'insertion locale.

Les syndicats, comme l'UGTG qui "razie" les postes à Pôle Emploi guadeloupéen, sont taxés de "radicalisme", étouffant le débat.

Two-tier employment ?

Ce n'est pas l'immigration qui est dénoncée, mais son instrumentalisation. Les ultramarins ne veulent pas de quotas pour des jobs low-skill sans perspective ; ils exigent des investissements : formations certifiantes, primes à l'embauche locale, et une LODEOM qui priorise les résidents.

France Travail ? A Réformer pour les DOM, avec des antennes décentralisées et des sanctions pour les employeurs contournant les priorités nationales. À cinq mois des municipales 2026, où le chômage sera l'un des juges de paix dans les Outre-mer, ce silence est criminel.

Les syndicats ont raison : c'est une "grève du chômage" permanente.
Les Outre-mer ne sont pas des colonies de dépannage, mais des territoires français.



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