Quand on veut, on peut ?
L’affaire Nour Atallah a suscité une vive controverse en France, mettant en lumière des tensions autour de l’antisémitisme, des politiques d’asile et des processus de sélection des bourses étudiantes. Ce dimanche 3 août 2025, Nour Atallah, une étudiante gazaouie de 25 ans accusée d’avoir tenu des propos antisémites sur les réseaux sociaux, a quitté la France pour le Qatar, où elle poursuivra ses études, selon un communiqué du ministère des Affaires étrangères.
Nour Atallah était arrivée en France le 11 juillet 2025 dans le cadre d’un programme de bourses financé par le consulat français de Jérusalem, destiné à accueillir 292 étudiants gazaouis depuis mars 2024. Sélectionnée pour son parcours académique – une licence en droit de l’Université de Palestine et un prix remporté en 2023 lors d’un concours de l’Institut français de Gaza –, elle devait intégrer Sciences Po Lille à la rentrée. Cependant, des publications sur son compte X, depuis supprimé, ont révélé des messages problématiques. Parmi eux, des posts glorifiant Adolf Hitler, appelant à « tuer des Juifs » ou incitant à l’exécution d’otages israéliens, notamment un message daté du 9 octobre 2023, deux jours après l’attaque du Hamas en Israël.
Bien que l’authenticité des captures d’écran n’ait pas été formellement confirmée par l’AFP, Sciences Po Lille a jugé ces propos « incompatibles avec les valeurs de l’établissement », entraînant l’annulation de son inscription le 30 juillet 2025.
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L’affaire a provoqué une onde de choc. Le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, a dénoncé des propos « inacceptables » et a ordonné la saisine du parquet de Lille, qui a ouvert une enquête pour « apologie du terrorisme » et « apologie de crime contre l’humanité via un service de communication en ligne ». Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a reconnu des failles dans les processus de contrôle, déclarant que « les criblages n’ont pas fonctionné ». Une enquête interne a été lancée, et le programme d’évacuation des Gazaouis a été suspendu, avec un réexamen des dossiers des 292 bénéficiaires.
Des figures politiques ont réagi avec fermeté. Élisabeth Borne, ministre de l’Éducation nationale, a affirmé que « de tels propos n’ont pas leur place en France », tandis que Gérald Darmanin, ministre de la Justice, a ajouté : « Nous n’avons pas besoin d’importer l’antisémitisme. » L’Union des étudiants juifs de France (UEJF) a salué la désinscription, mais certains, comme le député PS Arthur Delaporte, ont critiqué une décision jugée trop sévère pour une réfugiée.
Face à la menace d’une abrogation de son visa et d’un placement en centre de rétention, Nour Atallah a quitté la France pour le Qatar ce 3 août 2025, dans le cadre d’un accord négocié avec les autorités qatariennes. Jean-Noël Barrot a remercié le Qatar pour sa « coopération », précisant que l’étudiante « n’avait pas sa place en France ». Ce départ, perçu comme une alternative à une expulsion complexe sur le plan juridique, a toutefois suscité des débats. Des posts sur X ont pointé le choix du Qatar, un pays accusé par certains d’abriter des cadres du Hamas, comme destination.
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L’affaire Nour Atallah soulève des questions cruciales. Elle met en évidence les lacunes dans les processus de sélection des bénéficiaires de programmes humanitaires et ravive les débats sur l’antisémitisme en France. Certains, comme l’avocat Philippe Fontana, y voient un tournant dans la politique d’asile, marquée par une méfiance croissante envers l’humanitarisme. D’autres, comme Xavier Driencourt, ex-juge à la Cour nationale du droit d’asile, soulignent les obstacles juridiques à une expulsion vers Gaza, où la situation humanitaire rend tout retour impossible.
Enfin, des interrogations émergent sur le rôle du Hamas dans l’octroi des laissez-passer pour quitter Gaza, certains suggérant que seuls les proches de l’organisation en bénéficient. Cette hypothèse, bien que non confirmée, alimente les critiques sur la gestion du programme par la diplomatie française.
L’affaire Nour Atallah, bien que close par le départ de l’étudiante, laisse des traces. Les enquêtes en cours, la suspension des évacuations de Gazaouis et les débats sur l’antisémitisme et l’asile témoignent de la complexité de concilier humanitarisme et sécurité. Cette affaire continuera d’alimenter les discussions sur les politiques d’accueil et les mécanismes de contrôle en France.