Dans les eaux troubles de l'aménagement ultramarin, la Société d'Économie Mixte d'Aménagement de Saint-Martin (SEMSAMAR) flotte comme un paquebot en perdition, brandissant fièrement un label AFNOR fraîchement acquis comme un bouclier contre la tempête. Mais derrière cette façade de respectabilité, un déficit béant de -13 millions d'euros pour l'exercice 2024 – dissimulé sous un tapis de communication bien rodée – révèle une gestion pour le moins opaque. Cette structure, pilier supposé du développement immobilier en Guadeloupe, Saint-Martin, Guyane et Martinique, accumule les dettes tout en se parant des plumes d'une certification ISO 37001 anti-corruption. Un coup de maître en greenwashing institutionnel ? Ou simplement la énième illusion d'une entité publique qui préfère les apparences à la transparence ?
Rappelons encore rapidement les faits : la SEMSAMAR, créée il y a quarante ans pour orchestrer l'aménagement urbain et les logements sociaux dans les territoires d'outre-mer, traîne un passif judiciaire qui ferait rougir un comptable honnête. En décembre 2024, deux anciens dirigeants ont été condamnés à de la prison avec sursis pour abus de biens sociaux, prise illégale d'intérêts et favoritisme. Ces scandales, qui ont éclaboussé les colonnes des médias locaux, n'étaient que la pointe de l'iceberg d'une gouvernance gangrénée par les conflits d'intérêts et les marchés truqués.
Et que fait la SEMSAMAR face à ce bourbier ? Elle dégaine, en novembre 2025, à la veille d'élections municipales 2026, une certification ISO 37001 délivrée par AFNOR Certification, cette norme internationale censée attester d'un "système de management anti-corruption" irréprochable.
Sur le papier, c'est idyllique : audits annuels sur trois ans, dispositifs internes pour prévenir les risques, et une communication triomphante sur le site de la SEMSAMAR qui vante une "nouvelle ère de transparence". Philippe Lesoin, directeur général de l'organisme certificateur, n'hésite pas à qualifier cela d'"attestation que la SEMSAMAR a mis en place tout un dispositif pour éviter les problèmes de corruption".
Mais creusons un peu : cette norme ISO 37001 n'est pas un blanc-seing moral, mais un simple cadre procédural. Elle ne répare pas les abus passés, ni ne garantit une éthique future. C'est un label payant, un sticker doré collé sur une carrosserie rouillée. Et pendant que les dirigeants actuels, emmenés par Alain Richardson, paradent avec ce trophée, les contribuables ultramarins se demandent : à quoi servent ces 40 ans d'existence si c'est pour recycler les mêmes erreurs sous couvert d'un sigle ronflant ?
En brandissant son label AFNOR comme un étendard, la SEMSAMAR ne trompe personne – ou du moins, pas longtemps. Cette certification, obtenue moins d'un an après les condamnations judiciaires, ressemble à un exercice de relations publiques désespéré, une tentative de laver l'image souillée sans affronter les racines du mal : une gouvernance d'équilibristes, des audits superficiels et une addiction aux subventions publiques pour boucher les trous. À l'heure où les finances françaises ultramarines sont déjà exsangues – avec un déficit public national flirtant les 6 % du PIB en 2024 –, tolérer de tels errements est un luxe que nos territoires ne peuvent plus se permettre.
Que font les tutelles Préfecture, Région, actionnaires ? Exigent-elles des comptes réels, pas des labels cosmétiques ?
La SEMSAMAR ne doit-elle pas publier immédiatement son bilan 2024 intégral, soumettre ses pratiques à un audit indépendant au-delà des cases cochées ISO, et restructurer sa dette avant qu'elle n'avale les rêves d'aménagement des Antilles-Guyane ?
Quels plans d'actions prévoit la Semsamar pour sortir de cette zone rouge financière ? Un plan de restructuration ? Un plan social ?